83. Route de l’Est

Pourquoi route de l’Est ? Parce que ce sont ici nos étapes les plus à l’Est de notre voyage, encore plus à l’Est que Moscou.
Et c’est après avoir dépassé Hasankeyf que nous repartons doucement vers l’Ouest avec un petit pincement au cœur car désormais, nous rentrons doucement à la maison, par le chemin des écoliers bien sûr !
Mais tout d’abord, parlons un peu de cette région de la Turquie classée orange voire rouge par notre ministère des affaires étrangères du fait du risque djihadiste lié à la proximité avec la frontière syrienne et de l’activité des séparatistes kurdes. Les contrôles de police et de l’armée se multiplient, et nous voyons de plus en plus d’installations militaires le long de la route (vous ne verrez aucune photo, c’est strictement interdit et nous ne voulons courir aucun risque de provocation). Nous sommes donc vigilants et évitons les foules, bien que nous ne ressentions aucun sentiment d’insécurité tant les turcs et les kurdes sont accueillants. Nous ne croisons aucun touriste occidental depuis notre départ de Göreme, nous sommes donc très visibles, en moto qui plus est.
Notre route nous mène de Diyarbakir à Mardin, en passant par Batman (et oui !), le village de Hasankeyf, bientôt noyé par les eaux, et Midyad.
Nous n’avions pas prévu de visiter Diyarbakir, mais au moment de quitter l’hôtel, nous tombons sur Baran, son propriétaire kurde qui parle parfaitement le français pour avoir vécu à Paris où il possède une brasserie. Il a insisté pour nous faire visiter sa ville en trente minutes !

Nous voilà du coup sur la tour des sept frères, une des tours des remparts qui ceinturent la ville sur près de six kilomètres.
Diyarbakur se trouve sur la rive droite du Tigre. Un pont vieux de mille ans et en parfait état le traverse à l’Est de la ville. Plusieurs cafés ont installé sur les berges des tapis et coussins pour y boire le thé confortablement
Diyarbakir semble être une bien jolie ville, mais comme partout ailleurs en Turquie, nous voyons à la périphérie des maisons comme celle-ci, jamais terminées mais déjà habitées
Les paysages défilent, souvent montagneux et arides
Le terre nous offre toute une palette de brun, ocre, beige
Certaines vallées sont très vertes et plantées de vignes, au premier plan. Tous les pieds de vigne que nous avons vus courent sur le sol, aucun tuteur !

Hasankeyf

Un mot particulier pour ce village destiné à disparaître dans les mois à venir. En effet, dans le cadre du projet GAP, la Turquie construit des dizaines de barrages (22 à ce jour) sur le Tigre et l’Euphrate. Le barrage de Ilısuà est terminé et va conduire à la disparition du village de Hasankeyf, et au déplacement de ses 3000 habitants. De nombreux monuments et sites archéologiques vont également disparaître. Les habitants ont longtemps espéré que ce projet n’arrive pas à son terme, mais leur espoir s’est définitivement envolé ces derniers mois. Certains nous ont dit que si nous étions passé la veille, nous n’aurions vu personne car tous les habitants étaient dans la “nouvelle ville” construite sur le versant opposé du Tigre, pour prendre possession de leurs nouvelles demeures

L’eau va monter jusqu’en haut de la “digue” à droite de la photo, noyant le village, le vieux pont dont il ne reste que les piles, la citadelle taillée dans la roche, et d’autres monuments
Au premier plan, une partie du village qui va disparaître. Au fond, on aperçoit les constructions grises de la “nouvelle ville”

Une dizaine de monuments ont toutefois été (ou seront) déplacés vers un tout nouveau musée situé à côté de la “nouvelle ville”. Le mausolée Zeynel Bey a ainsi été déplacé, en un seul morceau ! La mosquée a été découpée en tronçons qui seront ré-assemblés. Son minaret a été démonté brique par brique

La “nouvelle ville” de Hasankeyf, sans âme. Toutes les maisons sont identiques, et les déplacés doivent débourser 25 000 € pour accéder à ces logements
Difficile de croire que ce bazar va être définitivement déserté dans trois jours. C’est pourtant bien le cas, la route d’accès à Hasankeyf sera définitivement fermée dans la semaine. Sans le savoir, nous sommes passés juste à temps

Mais revenons à des choses plus légères

Tout d’abord: les limitations de vitesse en Turquie. Sur les 27 pays que nous avons traversés, nous n’avions jamais vu de limite aussi précise. Avec la marge de tolérance qui est la même qu’en France, cela fait 87 km/h, gare aux radars !
Gare aussi à la police de la route qui veille !
Insolite: tout le long de la route, même en rase campagne, nous voyons ces cabanes qui abritent des vendeurs de fruits, légumes, conserves. Celle-ci est vide, mais ce que vous voyez à gauche est bien un frigo, plein de boissons, et qui tourne ! Il est branché (en pirate ?) au pylône électrique juste derrière.
Et pour finir, une nouvelle belle rencontre: nous faisons le plein d’essence et comme d’habitude, les pompistes nous proposent de boire le thé. Parmi eux, Zeynal, professeur de calligraphie, engage la discussion et nous dessine nos deux prénoms. Quel beau cadeau, merci Zeynal ! Quand on vous dit que l’accueil des turcs est exceptionnel ! Jamais un plein de carburant n’aura été aussi long: 45 mn de plaisir.

Cet article se termine, nous serons demain à Mardin dont l’ancienne ville est un vrai bijou. Mais Mardin est à seulement vingt kilomètres de la frontière syrienne, et les événements vont nous obliger à revoir notre programme. Mais pour en savoir plus, il faut patienter jusqu’au prochain article !

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